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Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/255

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l’élève. L’enthousiasme de l’honnête et du beau ne lui est pas étranger. Il n’y a rien que, sous la direction de la nature, on ne puisse obtenir de son effort. Voilà certes un témoignage qui semble placer la femme bien près de l’homme et lui donner le droit de partager d’égal à égal le bonheur attaché à leur union.

Telle n’est pas cependant, on le sait, la pensée de Rousseau. Ce n’est que par un détour de galanterie qu’il arrive plus tard, en guise de conclusion, à constituer dans les rapports des deux sexes une sorte d’équilibre. Après avoir nettement reconnu au profit des femmes la légitimité de ce que M. Legouvé a si heureusement appelé, de nos jours, l’égalité dans la différence, Rousseau rompt avec ses prémisses. On dirait qu’il n’a commencé par grandir la femme que pour lui faire mieux comprendre la nécessité de se subordonner. Sa verve chagrine avait-elle été excitée par quelque paradoxe mondain ? Il courait encore dans les salons, comme au dix-septième siècle, des thèses de convention sur l’égalité et l’indépendance absolue des sexes. M. de Puysieux avait traduit de l’anglais, aux applaudissements de tous, une œuvre satirique intitulée : La femme n’est pas inférieure à l’homme ; et Mme de Puysieux, prenant ses avantages, écrivait dans ses Conseils à une Amie : « Nous ne sommes pas plus faites pour les hommes que les hommes ne sont faits pour nous. » Si c’est à cet aphorisme que Rousseau eut l’intention de répondre, la réponse ne pèche point par le manque de netteté. « La femme, dit-il en substance, est faite pour plaire à l’homme. La dépendance est son état naturel, l’assujettissement son