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Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/27

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y mît son petit nez : il est trop matin pour elle ; — la morale de Nicole et la morale des poètes. Le goût que la jeune fille témoigne pour l’Essai sur les moyens de conserver la paix parmi les hommes lui donne bonne opinion d’elle, et elle ne comprend point par quel scrupule Mme de Grignan a pu lui interdire Corneille. « Je ne pense pas que vous ayez le courage d’obéir à votre père Lanterne — (quelque conseiller étroit et rabâcheur de fadaises), lui écrit-elle : voudriez- vous ne pas donner le plaisir à Pauline, qui a bien de l’esprit, d’en faire quelque usage en lisant Polyeucte et Cinna et les autres ? N’avoir de la dévotion que ce retranchement… me paraît être bottée à cru… M. et Mme de Pomponne en usent ainsi avec Félicité, à qui ils font apprendre l’italien et tout ce qui sert à former l’esprit. Ils ont élevé Mme de Vins de la même manière, et ils ne laisseront pas d’apprendre parfaitement bien à leur fille comme il faut être chrétienne, ce que c’est que d’être chrétienne et toute la beauté et solide sainteté de notre religion… ! » Encore un peu et elle recommanderait les Petites Lettres qu’elle faisait lire tout haut à son fils pour se divertir. À voir l’enchaînement de ces instructions familières, si délicates en même temps que si fermes, et qui d’année en année, comme il arrive quand on se sent écouté, devenaient plus pressantes, n’est-on pas fondé à dire que, de si loin qu’ils fussent adressés le plus souvent, les conseils de Mme deSévigné portaient juste, et qu’elle a largement contribué, plus que personne peut-étre, à constituer à Pauline cette dot de