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Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/299

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d’un peuple libre, aux mœurs austères, pour éveiller en lui les nobles émulations ; et elle constatait qu’à peine arrivé il avait mis de côté ses dentelles. « Une des choses qui l’ont le plus frappé, écrivait-elle avec une sorte de candeur qui devait ravir Rousseau, est la visite qu’il a été faire pour moi à l’un des premiers magistrats de la ville. Il l’a trouvé logé au troisième étage, vis-à-vis de son bureau éclairé de deux lampes, son cabinet meublé de livres et son salon d’une bergame. Cet homme, d’un certain âge et d’air vénérable, n’a pas cru manquer à sa dignité en venant lui-même éclairer et reconduire mon fils, attendu que tout son cortège consiste en une servante et qu’elle était sortie : lorsqu’il a vu ce même homme recevoir les honneurs de la garnison et les bénédictions du peuple en passant par les rues, il ne lui a pas été difficile, avec deux mots d’explication de notre part, d’apprécier son habit de velours à sa juste valeur. » Au milieu de ces divergences de direction, le véritable maître de l’enfant était Linant, une bête, disait Duclos, d’autant plus bête qu’il croyait avoir de l’esprit, un pauvre homme suivant Mme d’Épinay, un pédant à coup sûr, pour qui le plus grand crime était d’avoir fait un thème à la serpe, qui n’avait ni plan, ni méthode, qui passait sans idée d’un objet à un autre, si bien que « son élève ne pouvait même pas dire à quel genre d’études on l’appliquait et avait la tête étonnée lorsqu’on lui faisait une question, » assez artificieux d’ailleurs dans son intelligence bornée et trahissant un peu tout le monde, donnant doucereusement à croire à Mme d’Épinay qu’il l’élevait suivant ses principes, assurant M. d’Épinay qu’il le laissait à son clavecin trois