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Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/373

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avec un livre ou une plume à la main ; je suis présentement aussi satisfaite de l’emploi de mon temps, lorsque j’ai cousu une chemise à mon père ou additionné un compte de dépenses, qu’après avoir fait une lecture profonde. Je ne me soucie nullement d’être savante : je veux être bonne et heureuse, voilà ma grande affaire. Un sens droit, un cœur sincère, que faut-il de plus ? » Lors de son voyage à Londres, ce qui l’a le plus frappée et séduite dans les mœurs anglaises, c’est que les femmes appartiennent aux soins de la famille. Dans un Avis à sa fille, elle avait écrit elle-même une sorte de traité sur l’art de nourrir les enfants. Mais elle n’entendait pas que les soins de la vie domestique fussent exclusifs de toute autre occupation et qu’il fallût se laisser absorber par des goûts inférieurs. « J’ai vu, écrivait-elle, ce qu’on appelle de bonnes femmes de ménage insupportables au monde et même à leur mari par une précaution fatigante de leurs petites affaires. Je ne connais rien de si propre à rendre un homme épris de toute autre que de sa femme : elle doit lui paraître fort bonne pour sa gouvernante, mais non lui ôter l’envie de chercher ailleurs des agréments. Je veux qu’une femme tienne ou fasse tenir en bon état le linge et les hardes, nourrisse ses enfants, ordonne ou fasse sa cuisine, sans en parler, et avec une liberté d’esprit, une distribution de ses moments qui lui laissent la faculté de causer d’autre chose et de plaire enfin par son humeur, comme par les grâces de son sexe. J’ai eu occasion de remarquer qu’il en était à peu près de même dans le gouvernement des États, comme dans celui des familles ; ces fameuses ménagères, toujours citant leurs travaux, en laissent beaucoup en arrière en les