Page:Grégoire de Nysse - Discours catéchétique, 1908.djvu/201

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entière vers un but, parce que son désir du bien la met naturellement en mouvement.

[4] Mais le bien a deux formes : l’une véritable et naturelle, l’autre différente de celle-là, et colorée d’une apparence de bien. Leur critérium est l’intelligence établie au dedans de nous. On court avec elle la chance d’atteindre le véritable bien, ou le risque de se laisser détourner du bien par quelque apparence trompeuse, et de tomber dans l’état contraire, comme il arriva, dans la fable païenne [Ésope, cccxxxix, Κύων καὶ βρῶμα], à la chienne qui, ayant vu dans l’eau l’ombre de ce qu’elle portait dans sa gueule, lâcha sa véritable pitance, et après avoir ouvert la gueule pour avaler l’image de son dîner, se trouva en proie à la faim.

[5] Il arriva donc que l’intelligence induite en erreur dans son désir du vrai bien, fut détournée vers ce qui n’est pas ; trompée par l’instigateur et l’inventeur du vice, elle se laissa persuader que le bien était tout l’opposé du bien (car la tromperie fût restée sans effet, si l’apparence du bien n’avait été appliquée, à la façon d’un appât, à l’hameçon du vice) ; et l’homme tomba volontairement dans ce malheur quand il eut été amené par le plaisir à se soumettre à l’ennemi de la vie. Recherchez maintenant avec moi tous les attributs convenables aux idées que l’on se fait de Dieu, la bonté, la sagesse, la justice, la puissance, l’incorruptibilité et tout ce qui caractérise Dieu. [6] Étant bon, il prend donc en pitié l’homme déchu ; étant sage, il n’ignore pas le moyen de le sauver. Le discernement du juste peut rentrer aussi dans la sagesse, car on ne saurait allier à la clémence la véritable justice.