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ROMAN D’UN PÈRE.

part de ma chère femme, et je ne voulais pas d’intrus dans ces minutes solennelles.

On vint me chercher pour dîner ; je fis signe que je ne dînerais pas. Ma femme n’avait plus une notion bien exacte du temps. Elle était dans un demi-sommeil sans souffrance, comme l’avait prédit le docteur.

À huit heures, on m’apporta la petite fille, déshabillée, dans sa robe de nuit, les yeux gros de sommeil, — mais ne voulant pas dormir sans avoir embrassé « maman ».

Je la pris dans mes bras et je la penchai bien doucement sur la main de sa mère. Elle la baisa, puis remonta jusqu’au visage.

Ma femme ouvrit les yeux : une expression presque sauvage passa sur sa figure ; avec une force que je ne lui supposais pas, elle saisit l’enfant et la couvrit de baisers.

— Bonsoir, bonsoir ! dit la petite en agitant sa menotte.

Je la mis dans son petit lit, je la couvris soigneusement, et elle tomba aussitôt endormie.

Je me hâtai de revenir à ma femme. Elle semblait avoir oublié ce qui venait de se passer, et ses yeux éteints ne voyaient que le vague.

Des heures s’écoulèrent ainsi… courtes et