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ROMAN D’UN PÈRE.

J’appris alors que les renseignements obtenus par moi sur le compte de M. de Lincy avaient exactement la valeur de ceux qu’on obtient sur ses domestiques quand on a la faiblesse de croire à la validité des renseignements. Tous ceux qui avaient quelque intérêt à voir mon gendre faire un beau mariage, pour être débarrassés de lui ou de ses billets, tous ceux-là, amis, créanciers, tenanciers, voisins, avaient chanté le concert de louanges qui m’avait étourdi.

Depuis son retour à Paris, M. de Lincy, qui avait commencé par vendre Lincy pour se débarrasser d’hypothèques par trop exigeantes, s’était jeté à plein corps dans la vie qu’il avait toujours rêvée. Il aimait tout ce qui coûte de l’argent ; il aimait les soupers bruyants, les femmes plâtrées, l’ivresse des liqueurs, la frénésie du jeu. Jusqu’à son mariage, il avait soigneusement dompté ses appétits brutaux, afin de se faire un piédestal de sa bonne réputation pour faire un mariage riche. Depuis il se rattrapait, comme il le disait lui-même sans se gêner.

— Et voilà, m’écriai-je, pourquoi ma fille n’a pas de voiture, pourquoi elle porte toujours les mêmes robes depuis son mariage, pourquoi…