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SUZANNE NORMIS.

Le repas fut morne : nous n’avions pas le courage de feindre une gaieté dont nous étions si éloignés ; Suzanne, qui avait commencé par rire et plaisanter, comme d’habitude, se laissa gagner bientôt à notre gravité, et pressa le service pour avoir plus tôt fini.

Après le dîner, nous nous réunîmes dans notre petit salon, et ma fille fit faire une flambée pour chasser l’humidité qui pénétrait partout. La flamme jaillit bientôt en gerbes jusqu’au milieu de la vaste cheminée, et un semblant de confort régna dans le salon. Maurice prit son courage à deux mains.

— Il faut espérer, dit-il, que le temps ne sera pas si mauvais demain pour mon voyage.

— Une excursion ? fit Suzanne sans y attacher d’importance.

— Non, un voyage.

Ma fille s’était redressée et regardait le jeune homme avec anxiété.

— Je pars pour Paris, dit Maurice, sans oser lever les yeux.

— Pour Paris ! répéta Suzanne.

Elle joignit les mains sur ses genoux et nous regarda tour à tour.