Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/244

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le contraire : le roi dévoué à Dieu était tombé sur le champ de bataille, la fleur de l’armée israélite avait été fauchée, l’un des fils du roi était dans les fers et le pays se voyait dans une servitude ignominieuse. Quelle déception ! Ce dénouement provoqua une réaction, dont la conséquence fut une rechute dans l’idolâtrie ; gens du peuple et hommes instruits se mirent à douter d’un Dieu qui n’avait pas rempli ses promesses ou était impuissant à les remplir, et eurent la folie de croire que les divinités étrangères, qui s’étaient si longtemps maintenues sous Manassé, seraient plutôt capables d’assurer leur bonheur. Ils revinrent donc à leurs vieux péchés, rétablirent des hauts lieux sur chaque colline et sous chaque arbre des autels : une fois encore la Judée eut autant de dieux que de villes. Un culte tout spécial fut rendu à Néïth, la reine du ciel, divinité qui avait ses plus fervents adorateurs à Saïs, capitale du roi Nécho. N’avait-elle pas concouru, cette déesse, à procurer la victoire au roi d’Égypte ? On réintégra dans les maisons les statues d’or et d’argent, les images de bois ou de pierre, même celles qui, par leur attitude, offensaient la décence ; le temple aussi fut de nouveau profané, comme au temps de Manassé, par l’introduction de hideuses idoles. Chose encore plus odieuse, les sacrifices d’enfants reprirent faveur, comme sous les règnes d’Achaz et du fils d’Ézéchias ; de nouveau la belle vallée de Hinnom entendit les cris de pauvres petits êtres impitoyablement, brûlés en l’honneur de Moloch. C’étaient surtout les premiers-nés qu’on sacrifiait de la sorte.

Côte à côte avec la démence idolâtre, avec le culte obscène et infanticide, se propagèrent le vice et les mauvaises mœurs, la luxure, l’adultère, l’oppression des étrangers, des veuves et des orphelins, la vénalité des juges, l’habitude du mensonge, la fausseté, l’usure effrénée, l’inhumanité envers les débiteurs, enfin les homicides. Sans doute il existait déjà une classe d’hommes qu’animait le respect de la loi et qui gémissaient sur les atrocités dont ils étaient témoins, mais devant la foule de ceux qui journellement s’enfonçaient plus avant dans la bourbe idolâtre et dans la dépravation morale, les gens de bien ne pouvaient que soupirer. De faux prophètes exaltèrent les faux dieux et prônèrent la débauche. — Ce honteux recul fut-il l’œuvre du roi ? Ou l’ignore ; tout ce qu’on