Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/220

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gouvernement du pays à ses fils et ne songer qu’à accroître la puissance de sa famille. De ses quatre fils, qu’il avait eus de la Nabatéenne Kypros, l’aîné, Phasaël, fut nommé par lui préfet de Jérusalem et de la Judée, et le second, Hérode, âgé seulement de vingt-cinq ans, reçut le gouvernement de la Galilée.

Ce jeune homme fut le mauvais génie de la nation judaïque. Il semblait destiné à livrer la Judée pieds et poings liés entre les mains de Rome et à lui mettre son talon sur la nuque. Dès son apparition, comme un nuage orageux et menaçant, il projette une ombre sinistre sur la vie de la nation ; l’obscurité croit de plus en plus, toute lueur disparaît dans les ténèbres, et l’on ne marche plus qu’en chancelant et en trébuchant, comme dans l’obsession d’un rêve. Fidèle à la politique astucieuse de son père, Hérode commence par flatter bassement les Romains et par blesser le sentiment national. Pour se concilier la faveur de Rome et pour assurer en même temps le sort de sa famille, Hérode entreprit une expédition contre la bande d’Ézékias. Celui-ci fut fait prisonnier, et Hérode le fit décapiter avec quelques-uns de ses compagnons, sans autre forme de procès. Les Syriens et les Romains ne trouvèrent pas assez de termes pour remercier le dompteur de bandits, comme ils l’appelaient. Sextus César, que le dictateur romain avait nommé gouverneur de la Syrie (47-46), combla Hérode de faveurs, en récompense de cet exploit. Mais les patriotes étaient attristés ; ils voyaient avec terreur que de l’œuf du basilic, Antipater, était éclos un serpent venimeux. L’humiliation infligée à Hyrcan et à la nation par la famille iduméenne causa une douleur si vive, que quelques hommes de cœur osèrent aller trouver le prince pour l’éclairer sur sa triste situation. Ils lui représentèrent que sa dignité n’était plus qu’un mot et que le pouvoir appartenait réellement à Antipater et à ses fils. Ils rappelèrent le meurtre d’Ézékias et de ses compagnons, qui était un défi jeté à la Loi. Mais ces observations n’auraient sans doute produit aucun effet sur le prince, si les mères de ceux qu’Hérode avait massacrés ne lui avaient déchiré le cœur par leurs lamentations. Chaque fois qu’il paraissait dans le temple, elles se jetaient à ses pieds et le suppliaient de venger la mort de leurs enfants.