Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/233

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Dans son voyage à travers la Judée, elle déploya tous ses charmes pour l’exciter à commettre un acte qui aurait allumé la colère d’Antoine ; mais la prudence d’Hérode déjoua ses calculs. Pour se mettre à l’abri de son ressentiment et de celui du peuple, il songea à se préparer un asile. Il se fortifia dans la citadelle de Massada, située sur une hauteur escarpée, au bord de la mer Morte. Cléopâtre dut recourir à de nouveaux moyens pour amener sa chute, et elle lui suscita des complications avec les Nabatéens.

A peine était-il tranquille de ce côté, qu’une tempête s’éleva qui ébranla le monde romain jusque dans ses fondements et menaça d’entraîner dans son tourbillon le favori des gouvernants de Rome. Depuis que Rome et les peuples soumis à son pouvoir étaient aux pieds des triumvirs, Octave César, Marc-Antoine et Æmilius Lépide, et que ceux-ci cherchaient à se détruire mutuellement afin de régner sans partage, l’atmosphère politique était pleine d’éléments incendiaires qui pouvaient à chaque instant faire explosion. A cela s’ajoutait encore le fait que l’un des trois rivaux était dominé par Cléopâtre et que celle-ci cherchait à profiter de ses charmes pour devenir maîtresse de Rome, dût-on mettre toute la terre en feu. À cette époque troublée, un poète judéen chanta en beaux vers grecs, sous forme de prophétie sibylline, la chute de Rome et du monde grec et l’avènement de l’ère messianique. Le voyant judéo grec annonçait des temps terribles, l’apparition de Bélial, l’Anti-Messie qui séduira et perdra l’humanité.

On était, il est vrai, à une époque malheureuse ; une sorte de Bélial était apparu, le demi Judéen Hérode, mais on n’apercevait guère l’aurore du règne messianique. La rivalité d’Octave et d’Antoine alluma la guerre entre les deux parties de l’empire romain, l’Orient et l’Occident, l’Asie et l’Europe. Ce fut une guerre de peuples, mais elle prit bientôt fin par la chute d’Antoine, à la bataille d’Actium (2 septembre 31). Cette chute fut pour Hérode un coup terrible. Lui et les siens ne doutaient pas qu’il ne fut entraîné dans la ruine de son protecteur. N’avait-il pas été le fidèle allié d’Antoine ? Il s’attendait aux pires éventualités. Mais, par un trait suprême de perversité, il songeait à entraîner dans