Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/40

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C’est ainsi que Sanballat, vraisemblablement après la mort du roi Artaxerxés (420), éleva un temple au sommet de la fertile montagne de Gerizim (Garizim), au pied de la ville de Sichem, dans une contrée située précisément au centre de la Palestine. Les Aaronides bannis de Jérusalem firent choix de cet emplacement, parce que c’était du haut de cette montagne que, d’après le Deutéronome, devaient être bénis les observateurs de la Loi. Les Samaritains changèrent subrepticement la signification du mot. Ils désignèrent et désignent aujourd’hui encore le Gerizim sous le nom de montagne de la Bénédiction, comme si elle était, absolument parlant, la source de la bénédiction et du salut. Conséquemment aussi, ils nommèrent la ville de Sichem Bénédiction (Mabrachta). — Sanballat, ou les prêtres du temple de Gerizim, déclarèrent en outre que les Samaritains ne descendaient nullement des bannis transplantés là autrefois par un roi d’Assyrie, mais qu’ils étaient bel et bien des Israélites, les restes des dix tribus ou des souches de Joseph et d’Éphraïm. Il se peut, en effet, que parmi eux se soient trouvés quelques descendants des familles qui, après la chute du royaume d’Israël, subsistèrent près de Samarie ; mais que tous les Cuthéens de Sanballat se donnassent pour la postérité authentique de Joseph et d’Éphraïm et prissent le nom d’Israélites, c’était une de ces impostures audacieuses qui déconcertent, par leur audace même, ceux qui savent le mieux à quoi s’en tenir. Mais leur langue trahissait l’origine hétérogène de ce ramassis d’étrangers : c’était un jargon composé d’éléments aramaïques et autres, si barbares et si confus qu’il est impossible d’en reconnaître la source.

Quoi qu’il en soit, la tentative avait réussi. Les Samaritains avaient un temple autour duquel ils pouvaient se réunir, ils avaient des prêtres de la famille d’Aaron ; ils opposaient hardiment leur Har-Gerizim — comme ils nommaient leur montagne sainte — à celle de Moria, prouvaient par le livre de la Loi que Dieu lui-même avait destiné cette montagne à son culte, et s’appelaient eux-mêmes fièrement Israélites. Sanballat et ses successeurs s’appliquèrent à attirer parmi eux le plus grand nombre possible de Judéens. Ils leur concédaient des demeures et des terres, et leur prêtaient un appui efficace. Celui qui, dans Juda ou à