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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 2.djvu/71

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une somme incroyable de richesses et de puissance. Après la mort d’Évergète, en 223, son successeur Ptolémée IV (Philopator, 222-206) lui conserva ses fonctions ; et sous ce règne encore, il traita avec si peu de ménagements les cités imposables, qu’une mauvaise langue dit un jour en présence du roi : Joseph a si bien écorché toute la Syrie qu’il n’y reste plus que les os. — Un instant seulement, son étoile sembla pâlir. Le roi séleucide Antiochus, que ses flatteurs surnommèrent le Grand, prince à l’âme belliqueuse et aux vastes desseins, mais dénué de persévérance et d’esprit de suite, profita de la faiblesse de l’Égypte, énervée par la mollesse du voluptueux Philopator, pour lui arracher la possession de la Cœlé-Syrie (218). Le début de l’entreprise semblait lui promettre la victoire. Des généraux égyptiens trahissaient leur maître, passaient à l’ennemi et lui livraient les garnisons. C’est ainsi que Samarie, entre autres, tomba en son pouvoir. Néanmoins Jérusalem et la Judée, gouvernées par le fils de Tobie, restèrent fidèles à l’Égypte. Mais combien de temps pourront-elles résister au choc des armées syriennes ? Et si la Syrie prend l’offensive, de quel côté se rangera Joseph ? Il dut certainement avoir des heures de cruelle angoisse. Mais l’heure décisive sonna enfin. Philopator, secouant son inertie, accepta la lutte, et Antiochus, battu à plate couture, dut se retirer à Antioche et abandonner la possession de la Cœlé-Syrie. C’est ainsi que Joseph conserva sa position et les bonnes grâces de Philopator.

Ses relations intimes avec la cour d’Égypte amenèrent une transformation profonde dans la population judaïque, transformation moins sensible peut-être dans les provinces, mais frappante dans la capitale. Les grandes richesses qu’il avait amassées par la régie des impôts étaient une véritable pluie d’or pour le pays : de la pauvreté et de la misère, le peuple, grâce à lui, s’éleva au bien-être. Pour percevoir les impôts de tant de villes, il lui fallait des employés de confiance, et, naturellement, c’est dans son peuple qu’il les prenait de préférence. Ces employés s’enrichirent de leur côté et en conçurent un grand orgueil.

Cette opulence soudaine, la faveur dont jouissait le fils de Tobie à la cour de Philopator, la force armée dont il disposait et par laquelle il tenait en respect les différentes peuplades de Palestine,