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question. Ceux des docteurs qui avaient survécu à la guerre de Barcokeba se réunirent dans un grenier, à Lydda, pour délibérer sur cette grave affaire. Parmi les membres de cette réunion, on nomme Akiba, Tarphon et José le Galiléen ; il s’y trouvait sans doute aussi Ismaël, ce docteur si conciliant et si modéré, dont le caractère ressemblait beaucoup à celui de Josua. Il était facile de prévoir qu’entre des docteurs, d’esprits si divers, il se produirait des divergences d’opinion dans une question d’une telle gravité.

Les rigoristes paraissent avoir déclaré qu’en temps de persécution religieuse, tout juif est tenu de subir le martyr plutôt que de transgresser la moindre prescription. Ismaël émit une opinion diamétralement opposée. D’après lui, il serait permis de transgresser toutes les lois pour échapper à la mort, parce qu’il est dit dans la Tora que les prescriptions sont destinées à assurer la vie à ceux qui les observent et non pas à les faire périr. Ce docteur était d’avis de se soumettre momentanément à la législation oppressive des Romains. La réunion s’arrêta à un moyen terme, elle établit une différence entre les lois fondamentales du judaïsme et les ordonnances de moindre importance, et elle décida que, si l’on y était contraint sous peine de mort, on pouvait enfreindre en secret toutes les prescriptions religieuses, à l’exception des trois suivantes : la défense d’adorer des idoles, de contracter une union prohibée et de commettre un homicide. Cette décision, qui montre dans quelle situation difficile se trouvaient alors les juifs, semble avoir contenu une clause secrète qui permettait, en cas de nécessité, de transgresser en apparence ou de détourner les lois, mais qui prescrivait de les observer en toute autre circonstance aussi rigoureusement que possible. Mais tous ne se conformaient pas aux mesures prises par les docteurs. Il y en avait beaucoup, il est vrai, qui faisaient semblant, devant les délateurs romains, de transgresser les prescriptions religieuses. La nécessité les rendait inventifs, et l’on est profondément touché des mille subterfuges qu’ils employaient pour échapper à la mort sans trahir leur foi. La lecture de la Tora se faisait sur les toits, loin des regards inquisiteurs des espions. Akiba lui-même, remarquant un jour qu’il était surveillé par un Romain, fit signe à ses disciples, qui l’entouraient, de réciter la prière du