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grande beauté, nommée Rihâna ; celle-ci repoussa fièrement les faveurs du prophète.

L’année suivante arriva le tour des Juifs de Khaïbar. Mais la campagne que Mahomet entreprit contre eux fut autrement difficile que les précédentes guerres. La région était couverte d’une série de forts défendus par de vaillants et solides guerriers ; des tribus arabes, les Ghatafan et les Fezara, avaient promis leur aide. L’âme de la résistance était l’exilé nadirhite Kinanah ibn-ar-Rabia, homme d’une volonté tenace et d’une bravoure indomptable, surnommé « le roi des Juifs ». Il avait comme lieutenant Marhab, un vrai géant, d’origine himyarite. Mahomet commença par adresser des prières solennelles à Dieu pour lui demander la victoire. Cet acte de piété accompli, il marcha contre les Juifs de Khaïbar avec une armée de quatorze mille hommes. Selon son habitude, il signala son entrée en campagne par la destruction des palmiers pour couper les vivres à l’ennemi ; ensuite, il s’empara assez facilement de quelques fortins. Le château fort Camuss, qui s’élevait sur un rocher abrupt, opposa une plus longue résistance ; il repoussa plusieurs assauts tentés par les meilleurs capitaines de Mahomet, Abou-Bekr et Omar. Un des défenseurs de Camuss était Marhab, qui avait à venger la mort de son frère Harith ; il fit des prodiges de valeur. Quand Ali, un autre lieutenant de Mahomet, s’approcha du fort, Marhab lui cria : « Khaïbar connaît ma vaillance, je suis Marhab le héros, couvert d’une solide armure et dur à la fatigue, » et il provoqua Ali à un combat singulier ; il fut tué. Avec Marhab tomba également la forteresse de Camuss. On ne sait pas ce qui advint des prisonniers. Kinanah fut mis à la torture pour qu’il indiquât l’endroit où étaient cachés les trésors des vaincus ; il mourut sans avoir parlé. La chute de cette forteresse amena la reddition des autres châteaux forts ; Fadak, Wadi-l-Kora et Taïma se soumirent également au prophète. Les Juifs purent rester dans la pays et conserver leurs terres, à condition de remettre à Mahomet, comme tribut, la moitié de leurs revenus. Cette campagne avait duré près de deux mois (printemps 628).

Mahomet ramena de cette guerre deux belles captives, Safia, la fille de son ennemi implacable Houyey, et Zaïnab, la sœur de