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blant de dédommagement. Poussés au désespoir par ces mesures rigoureuses, ils se mirent en rapport avec leurs frères d’Afrique pour détruire la puissance wisigothe (694) ; ils comptèrent probablement, pour l’exécution de ce projet, sur le concours du khalife, au dehors, et, dans le pays même, sur l’appui des seigneurs mécontents. Le complot aurait pu réussir dans l’état de décadence où se trouvait alors l’empire Visigoth, il fut dévoilé trop tôt. Non seulement les coupables, mais tous les Juifs de l’Espagne et de la Septimanie, province gauloise qui appartenait aux Visigoths, furent réduits en servage et répartis entre les grands du pays, sans pouvoir jamais être affranchis. Les enfants au-dessous de sept ans furent arrachés à leurs parents, afin d’être élevés dans le christianisme. Seuls, les guerriers juifs qui défendaient les défilés des Pyrénées contre les invasions du dehors conservèrent leur liberté.

Mais l’empire Visigoth touchait à sa fin. Après la mort de Witisa, fils d’Egica, Tarik, le conquérant mahométan, vint de l’Afrique en Andalousie avec des forces considérables, il fut rejoint par tous les Juifs bannis d’Espagne et par ceux qui étaient restés dans la Péninsule. Après la bataille de Xerès (juillet 711) et la mort de Roderic, dernier roi des Visigoths, les Arabes victorieux s’avancèrent rapidement dans l’intérieur du pays. Grâce à l’appui des Juifs, auxquels ils confiaient la garde des villes dont ils s’emparaient, les généraux musulmans disposaient toujours de presque toute leur armée pour continuer la conquête du pays, et ils triomphaient ainsi facilement des résistances qu’ils rencontraient. Quand Tarik s’approcha de Tolède, il ne s’y trouvait plus qu’une faible garnison ; les grands et le clergé s’en étaient enfuis. Pendant que les chrétiens invoquaient, dans les églises, la protection divine (dimanche des Rameaux de l’an 712), les Juifs ouvrirent les portes de la ville au général arabe, qu’ils acclamèrent comme un libérateur. Ils avaient tant souffert depuis Reccared et Sisebut ! Un peu plus tard, le gouverneur d’Afrique, Mousa-ibn-Nosaïr, envahit l’Espagne avec une seconde armée et s’empara d’un certain nombre de villes, il en laissa également la garde aux Juifs.

L’Espagne tout entière devint une province musulmane, et les