puisqu’ils avaient rompu de leur plein gré le lien qui les rattachait aux Judéens.
Quoique les judéo-chrétiens fussent exclus de la communauté judaïque, leurs doctrines continuèrent à agir sur les Judéens. Certaines conceptions gnostiques, c’est-à-dire demi-chrétiennes, s’étaient introduites dans le judaïsme. Les idées sur la matière première de l’univers, sur les éons, sur la division des hommes en trois classes, sur l’existence de deux dieux, un dieu de la bonté et un dieu de la justice, avaient été accueillies avec faveur et avaient pénétré assez profondément dans les esprits pour se refléter dans la prière. Certains passages rappelaient clairement des pensées gnostiques ou chrétiennes. Des formules de prières, telles que les suivantes : Seigneur, les bons te louent, ou, Que ton nom soit invoqué pour le bien, la répétition de ces mots : Seigneur, c’est toi que nous louons, l’emploi de deux termes différents pour désigner Dieu, tout cela était considéré comme faisant allusion à la fausse doctrine des théosophes, qui faisait ressortir la bonté de Dieu au détriment de sa justice et attaquait ainsi le principe fondamental du judaïsme. Le développement des conceptions gnostiques parmi les Judéens était favorisé par l’étude approfondie du chapitre de la Création et de la description du char divin donnée par le prophète Ézéchiel. Ces récits obscurs et étranges offraient un vaste champ à la fantaisie et à l’imagination ; grâce au système aggadique de cette époque, on découvrait dans toute expression un peu singulière les significations les plus variées et les plus éloignées du sens réel. Plus ces questions étaient difficiles et embrouillées, plus elles présentaient d’attrait et de charme. Beaucoup de Judéens s’en occupaient avec passion et disaient, dans leur langage figuré de mystiques, qu’ils pénétraient dans le Paradis. On mentionne plusieurs docteurs qui se consacrèrent à cette profonde ou plutôt à cette fausse science, quoiqu’il fût parfaitement établi que des recherches de ce genre étaient excessivement dangereuses pour les croyances judaïques. Ainsi, il est raconté que de quatre docteurs qui avaient voulu approfondir ces questions, Ben-Zoma perdit la raison, Ben-Azaï mourut très jeune, Aher déserta le judaïsme, dont il devint un détracteur et un ennemi, et Akiba seul échappa heureusement au