très rapidement. Cordoue tomba au pouvoir des Almohades au mois de juin 1148, et en moins d’un an la plus grande partie de l’Andalousie subit le même sort. Partout on passa le vainqueur, les Juifs furent condamnés à choisir entre l’apostasie, l’émigration ou la mort, et les synagogues furent détruites. Un vieux rabbin de Cordoue, Joseph ibn Zadik, eut la douleur d’assister à la ruine de sa communauté, la plus ancienne et la plus considérée de l’Espagne ; il mourut bientôt après (fin de 1148 ou commencement de 1149). Les brillantes écoles juives de Séville et de Lucéna furent fermées. Meïr, fils et successeur de Joseph ibn Migasch, partit de Lucéna pour Tolède, suivi de tous ceux qui pouvaient quitter la ville. Les autres se firent musulmans en apparence et pratiquèrent en secret le judaïsme, attendant une occasion favorable pour revenir publiquement à leur ancienne religion.
À la suite de ces douloureux événements, le centre du judaïsme se déplaça de l’Espagne musulmane dans l’Espagne chrétienne. Ce dernier pays était alors gouverné par Alphonse Raimundez (1126-1157), souverain libéral et équitable, dont un des conseillers était Juda ibn Ezra, fils de ce Joseph ibn Ezra qui, avec ses trois frères, occupe un rang très honorable dans la littérature hispano-juive. Après avoir conquis la forteresse de Calatrava, située entre Tolède et Cordoue, Alphonse Raimundez confia à Juda ibn Ezra le gouvernement de celte ville et lui accorda en même temps le titre de prince.
Juda mit son influence au service de ceux de ses coreligionnaires qui fuyaient alors devant l’intolérance des Almohades, facilitant leur établissement dans l’Espagne chrétienne et consacrant sa fortune au rachat de ceux qui avaient été faits prisonniers. Il y eut bientôt à Tolède une colonie considérable d’émigrés juifs, et peu après on fonda dans cette ville, sous la haute protection du souverain chrétien, des écoles juives qui attirèrent de nombreux disciples.
Juda ibn Ezra, dont les services étaient de plus en plus appréciés par son maître, fut élevé, en 1149, à la dignité d’intendant de la maison impériale. Dans son zèle pour le rabbinisme, il se laissa entraîner à persécuter les caraïtes, qui étaient alors assez nombreux en Espagne. Il est vrai qu’ils avaient provoqué leurs adversaires par des polémiques violentes.