Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 4.djvu/256

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inquisitorial. Les Juifs marchaient sur les traces des dominicains.

Au début, la sentence prononcée contre la science ne rit pas sentir son action en dehors des limites de Barcelone. Car au moyen âge, les communautés étaient organisées de telle sorte 41welles étaient absolument indépendantes les unes des autres et glue les décisions de l’une n’étaient pas valables pour les autres. Pour gagner de nouveaux adhérents à l’obscurantisme, Ben Adret communiqua la formule d’excommunication prononcée contre les études profanes aux communautés de l’Espagne, du Languedoc, du nord de la France et de l’Allemagne, et il leur demanda leur appui. Mais sa propagande rencontra de la résistance. Jacob Tibbon et ses partisans avaient eu, en effet, vent de ce qui se tramait à Barcelone, et pour annuler l’effet des menaces dirigées par Ben Adret contre ceux qui s’occuperaient d’études profanes, ils opposèrent anathème contre anathème. Ils publièrent à Montpellier une résolution contenant trois points principaux, et par laquelle ils excommuniaient quiconque, par scrupule religieux, dissuaderait ou empêcherait ses enfants, à quelque âge qu’ils fussent, de s’adonner à des études profanes, en n’importe quelle langue, ou proférerait une injure ou une accusation d’hérésie contre Maimonide, ou enfin outragerait un écrivain religieux à cause des tendances philosophiques de son esprit. Cette résolution en faveur de la science fut proclamée à la synagogue de Montpellier et adoptée par la majeure partie de la communauté.

Entraînés par l’ardeur de la lutte, Jacob Tibbon et ses amis firent une démarche analogue à celle que les obscurantistes avaient faite un siècle auparavant, et qui aurait pu avoir les mêmes conséquences funestes. Comme ils entretenaient des relations amicales avec le gouverneur de la ville, ils voulurent s’assurer son concours pour le cas où leurs adversaires tenteraient de contraindre les Juifs de Montpellier à se soumettre à la décision prise à Barcelone. Mais le gouverneur leur répliqua qu’à ses yeux le seul point qui importait, c’était que la jeunesse juive ne fût pas empêchée de lire et d’étudier d’autres ouvrages que le Talmud. Car, déclara-t-il avec franchise, il ne permettrait pas que par des menaces d’excommunication, on supprimât les voies et moyens qui pourraient faciliter la conversion des Juifs au catholicisme.