Les excitations de Capistrano firent sentir leur action malfaisante jusqu’en Pologne, où elles troublèrent la tranquillité dont les Juifs jouissaient dans ce pays depuis des siècles. La Pologne était devenue, en effet, depuis longtemps, un asile pour les Juifs persécutés d’Allemagne, d’Autriche et de Hongrie, qui y vivaient en sécurité sous la protection des privilèges accordés par le duc Boleslas et ratifiés par le roi Casimir le Grand et ses successeurs. La présence des Juifs était, du reste, très utile à la Pologne, où ils fermaient la classe intermédiaire entre la noblesse et les serfs, s’occupant de commerce, contribuant à la circulation du numéraire et faisant valoir les ressources du pays.
Pendant que Casimir IV, peu de temps après son avènement au trône, résida à Posen, cette ville fut entièrement détruite par un incendie, sauf quelques maisons construites en pierre, et avec aile disparut la charte où se trouvaient énumérés les privilèges accordés aux Juifs un siècle auparavant par Casimir le Grand. Inquiets de la perte d’un document aussi important, des délégués de nombreuses communautés polonaises vinrent demander à Casimir IV de faire établir une nouvelle charte d’après les copies existantes, et, en général, de leur confirmer leurs anciennes prérogatives. Le roi, accédant à leur vœu, leur octroya les privilèges qu’ils sollicitaient de lui (Cracovie, 14 août 1447).
Grâce à ce nouveau statut, dont les dispositions étaient même plus favorables que celles de l’ancien et abolissaient plusieurs lois canoniques, les Juifs de Pologne avaient une situation bien plus satisfaisante que leurs coreligionnaires des autres pays d’Europe. Ainsi, ce statut défend de les citer devant un tribunal ecclésiastique, et, s’ils sont cités, ils peuvent ne pas en tenir compte. Les palatins sont invités à les protéger efficacement contre le clergé et contre Lotit autre agresseur. Défense est faite de porter contre eux une accusation de meurtre rituel ou de profanation d’hostie, parce que les Juifs ne commettent pas de tels crimes, qui sont interdits par leur religion. Un chrétien les accuse-t-il d’un pareil acte, il n’est cru que s’il est appuyé par d’honnêtes témoins juifs du pays et quatre témoins chrétiens, également honnêtes et indigènes. En tout cas, on ne pourra punir que le coupable, mais nul autre de ses coreligionnaires. Si l’accusateur