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sivement, à la tête de l’école de Pumbadita, de rendre au gaonat de l’éclat et de la vigueur, ils ne réussirent qu’à en retarder d’un demi-siècle la disparition définitive. Ces deux savants illustres, les derniers chefs de l’académie de Pumbadita, étaient Scherira et son fils Haï, surnommés plus tard « les pères et les docteurs d’Israël ».

Scherira (né vers 930, mort l’an 1000), fils du gaon Hanina, descendait, par son père comme par sa mère, de familles très distinguées, dont plusieurs membres avaient été investis de la dignité de gaon. Sur le sceau de la famille était gravé un lion, qui représentait autrefois, paraît-il, les armes des rois de Juda. C’était un gaon de la vieille roche, hostile aux spéculations philosophiques et zélé pour l’enseignement du Talmud. Tout en sachant l’arabe assez bien pour correspondre dans cette langue avec les communautés juives des pays musulmans, il avait peu de goût pour la littérature arabe et aimait mieux écrire en hébreu ou en araméen. L’exégèse biblique ne le préoccupait guère, il concentrait tous ses efforts intellectuels sur l’étude du Talmud. Mais sa haute moralité faisait oublier les lacunes de son instruction. Comme juge, il était d’une intégrité absolue, et comme chef d’école il déployait une activité infatigable.

Son ouvrage le plus important, celui qui l’a rendu célèbre, est la Lettre qu’il a écrite sur l’époque talmudique et post-talmudique et sur la période des gaonim. Cette lettre fut composée à la suite d’une demande adressée à Scherira, au nom de la communauté de Kairouan, par Jacob ben Nissim ibn Schahin, disciple de ce Huschiel qui avait été emmené comme esclave en Afrique et avait ensuite fondé une école talmudique à Kairouan. Ibn Schahin désirait avoir quelques éclaircissements sur la rédaction de la Mischna. Dans un exposé lumineux, écrit moitié en hébreu et moitié en chaldéen, Scherira élucida (en 987) quelques points obscurs de l’histoire juive. Ce travail, qui seul nous fait connaître la suite des saboraïm et des gaonim, a les qualités et les défauts ordinaires de la chronique, il est sec et aride, mais exact et précis. On y reconnaît cependant une certaine partialité pour les exilarques de la famille de Bostanaï et pour quelques contemporains de Scherira, notamment pour Aaron ibn Sardjadou.