une autorité religieuse. À l’exemple de son père, il manifestait en toute circonstance les sentiments les plus élevés, n’hésitant jamais à risquer sa fortune et sa vie quand il s’agissait de défendre la religion ou la morale ou de venir en aide aux proscrits d’Espagne. Un jour que cinquante de ces malheureux, qui avaient été jetés par un naufrage sur la côte de Séville, incarcérés et retenus en prison pendant deux ans et finalement vendus comme esclaves, arrivèrent à Alger, Simon Duran fit les plus louables efforts pour recueillir dans sa petite communauté la somme de 700 ducats exigée pour leur rançon.
À Tunis aussi, deux sefardim distingués trouvèrent un refuge pendant quelques années : ce furent l’historien et astronome Abraham Zacuto, alors au déclin de la vie, et un homme plus jeune, Moïse Alaschkar. Bien que Zacuto eût dirigé, dans la péninsule ibérique, une école de mathématiques et d’astronomie fréquentée par des élèves chrétiens et musulmans, et eût publié des ouvrages qui étaient beaucoup lus et utilisés, il fut condamné, après l’expulsion des Juifs, à mener la vie errante et misérable de banni et ne put échapper qu’avec peine à la mort. Il semble avoir trouvé un peu de tranquillité à Tunis, où il acheva (en 1504) sa chronique connue sous le nom de Yokasin, et qui est plus célèbre qu’utile. Cet ouvrage se ressent, en effet, de l’âge avancé et de la situation précaire de son auteur, qui manqua, du reste, des documents nécessaires pour écrire une histoire sérieuse. Le Yokasin a pourtant un grand mérite, il réveilla parmi les Juifs le goût des recherches historiques.
Moïse ben Isaac Alaschkar, qui résida à Tunis en même temps que Zacuto, était un talmudiste remarquable, comme son maître Samuel Alvalensi, mort à un âge peu avancé. Esprit juste et ouvert, il défendit Maïmonide et sa philosophie contre les attaques et les anathèmes des obscurantistes, tout en marquant sa prédilection pour la Cabale.
Les succès remportés par les Espagnols dans le nord de l’Afrique semblent avoir engagé Zacuto, Alaschkar et beaucoup d’autres Juifs à quitter Tunis, car ils connaissaient par expérience la cruauté des fanatiques Espagnols et ne voulaient pas s’exposer à tomber entre leurs mains. Zacuto se réfugia en Turquie, où il