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Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/362

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familles juives. Brème l’imita. La ville de Francfort, liée par certains engagements, ne put en agir de même, mais fit subir aux habitants juifs les plus humiliantes vexations, les excluant des réunions où se traitaient les intérêts municipaux, les révoquant des emplois officiels qu’ils occupaient, leur fermant l’accès de beaucoup de professions et de métiers, leur refusant l’autorisation nécessaire pour se marier et les parquant de nouveau dans un quartier spécial. Comme le Sénat de Francfort savait que la Prusse et l’Autriche étaient presque engagées d’honneur envers les Juifs de cette ville pour leur garantir le maintien de leurs droits, il chercha à justifier sa conduite par un mémoire juridique qu’il fit rédiger par les Facultés de Bertin, de Marbourg et de Giessen. Mais la communauté de Francfort ne resta pas inactive. De son côté, elle soumit (janvier 1816) à la diète de la Confédération en Mémoire où elle exposait le bien-fondé de ses réclamations. L’auteur de ce mémoire, d’un caractère à la fois politique et juridique, était Louis Bœrne.

La lutte du Sénat contre tes Juifs de Francfort, qui se prolongea pendant neuf ans (1815-1824), restera toujours comme une déplorable manifestation du pédantisme et de l’étroitesse d’esprit des Allemands. En réponse au Mémoire qui leur avait été soumis, les cinq jurisconsultes de la Faculté de Berlin déclarèrent gravement qu’en vertu du règlement de 1616, les Juifs de Francfort sont et doivent rester les subordonnés, presque les serfs des bourgeois de cette ville ! En même temps s’élevèrent de tous les points de l’Allemagne des voix haineuses qui invitaient le peuple et la Confédération à humilier ou même à exterminer les Juifs. Des journaux et des pamphlets parurent qui étaient remplis des plus violentes excitations, comme si le salut de l’Allemagne et du christianisme exigeait absolument la disparition des Juifs. Cette agitation littéraire, qui déchaîna tant de passions et provoqua même des désordres, dura plusieurs années. Le signal en fut donné, en janvier 1816, par Frédéric Rühs, déjà fameux par ses attaques contre le judaïsme. Son exemple ne tarda pas à être suivi par Frédéric Fries, médecin et professeur des sciences naturelles à Heidelberg. Fries publia un ouvrage, Influence dangereuse des Juifs sur le bien-être et le caractère allemands,