Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 5.djvu/71

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conformes à leur propre désir ou à leurs propres intérêts, João III ne tint nul compte de l’invitation du pape. Pour mieux faire triompher l’Inquisition, son ambassadeur à Rome lui conseilla même d’imiter l’exemple du roi d’Angleterre et de se séparer de l’Église romaine.

Mais Paul III tint bon. Il promulgua une nouvelle bulle (2 octobre 1535), par laquelle il donna l’absolution aux Marranes pour leurs fautes passées et défendit aux autorités temporelles et spirituelles de les poursuivre pour crime d’hérésie ou d’apostasie. L’Inquisition qui, en apparence du moins, avait besoin de l’autorisation pontificale, dut donc suspendre encore une fois son action. Le légat du pape en Portugal se montra également très énergique. Après avoir publié la bulle, il fit si bien que l’infant Dom Alphonse, malgré sa haine pour les Marranes, ordonna lui-même d’ouvrir les prisons et de rendre la liberté à tous ceux qui avaient été recommandés de Rome, en tout dix-huit cents (décembre 1535).

Le gouvernement portugais n’avait presque cédé que par surprise à nette intervention énergique en faveur des Marranes. Bientôt, il reprit ses manœuvres pour se rendre maître absolu de leurs personnes et de leurs richesses. Pour atteindre son but, il ne recula même pas devant le crime. Un jour, en effet, Duarte de Paz fut attaqué en pleine rue et grièvement blessé (janvier 1536). À Rome, on était convaincu que l’ordre de cet attentat était parti de Lisbonne. Le pape en fut très irrité. Grâce aux soins que Paul III lui fit donner par ses meilleurs médecins, Duarte se rétablit.

Pour triompher plus sûrement de tous les obstacles, la cour du Portugal demanda l’appui de Charles-Quint. Cet empereur venait alors de remporter une éclatante victoire sur le musulman Barberousse, qui, soutenu par la Turquie, avait inquiété toute la chrétienté. Après la prise de Tunis et la défaite de Barberousse, Charles-Quint revint en triomphateur à Rome (avril 1536), où il demanda au pape d’autoriser enfin l’introduction de l’Inquisition en Portugal. Malgré tout, le pape hésitait encore. Mais, sur les instances réitérées de l’empereur, il dut enfin céder (23 mai 1536). Il entoura pourtant le fonctionnement du Saint-Office de quelques