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SE LÈVE AVEC DES PUCES.

Gamboa, comment vous jouerez votre rôle. Oserez-vous l’arrêter le premier ?

— J’arrêterais le vice-roi, si vous le vouliez.

Un soupir lui répondit ; le marquis de Belcazer arriva sur la plage, et dom Bartholomeo s’élança vers lui.

— Seigneur marquis, rendez-vous ! s’écria-t-il.

Le marquis n’avait avec lui que quatre laquais sans armes ; il voulut tirer son épée, mais dom César le désarma, tandis que ses amis terrassaient les valets ; un seul parvint à s’enfuir, grâce à la nuit.

— Vite, dépêchons, dit dom César à voix basse ; des quatre drôles qui accompagnaient Sa Seigneurie, je n’en vois que trois couchés sur le sable ; craignons que l’autre ne donne l’alarme au château.

En un tour de main, le marquis de Belcazer fut dépouillé, garrotté et bâillonné. On le transporta dans le bateau, et la compagnie s’apprêta à s’embarquer.

— Il me semble voir de la lumière briller du côté du château, dit dona Dorothea ; vite, informez-vous de ce que ça peut être, seigneur dom Bartholomeo.

Gamboa courut dans la direction que lui indiquait le doigt de la senhora. Il ne vit rien, et se hâta de retourner vers la plage. Tout avait disparu, la barque, les cavaliers, les captifs et dona Dorothea. Tandis que dom Bartholomeo cherchait du regard autour de lui, il entendit un grand tumulte dans les jardins ; vingt torches flamboyaient entre les arbres, où passaient les silhouettes noires de grands laquais armés de longues épées. Le seigneur Gamboa réfléchit qu’il était seul ; de là lui vint la pensée de fuir. Il se jeta au milieu des taillis qui bordaient le fleuve, et gagna,