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LÀ OÙ SONT LES POUSSINS, ETC.

et beaux comme tous ceux que la littérature fait voyager en Espagne. Ernest et Eugène habitaient l’hôtel de El Rey Boabdil. Tous les jours, à l’heure où le vent qui vient des Alpuxaras rafraîchit l’atmosphère, ils se mettaient à leur fenêtre ; c’était aussi le moment que Miranda et Soledad choisissaient pour paraître à leur balcon. Passons du côté de la fenêtre pour entendre ce que disent les deux jeunes gens.

— Mon cher Ernest, tu as grand tort de soutenir la prééminence des femmes de Paris.

— Mais c’est toi, au contraire, qui prétends que le royaume des jolies femmes est borné au nord par le Café de Paris, et au sud par la rue Montmartre.

— Je n’ai jamais prétendu cela, reprit Eugène avec humeur.

— Je ne me suis jamais fait, ajouta Ernest avec une certaine vivacité, le champion exclusif de nos compatriotes.

— Les Espagnoles ont tant de lumière dans le regard ! Examine plutôt Soledad.

Et tant de finesse dans le pied ! Regarde plutôt Miranda.

— Ah çà ! qui t’a dit qu’elle s’appelait Miranda ?

— Qui t’a appris qu’elle se nommait Soledad ?

Les deux jeunes gens rougirent légèrement, puis ils échangèrent un sourire.

— Avoue, Eugène, que tu es amoureux.

— Conviens, Ernest, que ton cœur est pris.

— Cela est vrai, j’adore Soledad.

— Je le confesse, je meurs d’amour pour Miranda.

Plaçons-nous maintenant sous le balcon ; les deux jeunes