Deux jours après, Étienne Galabert s’absenta pour un voyage. À son retour à Paris, vers la fin de l’hiver, il n’eut rien de plus pressé que de se rendre chez Jacques Maubertin.
Aussitôt qu’il l’aperçut, Jacques Maubertin lui tendit la main. Hélas ! que le pauvre homme était changé ! La pâleur s’étendait sur ses joues ; un cercle bleuâtre entourait ses paupières ; un triste sourire errait sur ses lèvres.
— Es-tu malade ? s’écria Étienne.
— Non ; mais je suis marié, répondit Jacques.
— Quoi ! ton archange ?…
— Est un démon.
— Écoute, mon ami Jacques ; je crois que tu exagères encore ; si je ne crois pas aux séraphins, je ne crois pas non plus aux diables. Je veux bien supposer, puisque tu l’exiges, que ta femme n’est pas la Sainte-Vierge ; mais encore permets-moi de n’être pas convaincu que ce soit Lucifer.
— C’est au moins son cousin, Astaroth ou Belzébuth.
— Quoi ! l’héritière d’une famille de noblesse de robe du Bourbonnais !
— Belle noblesse, ma foi ! Pour rendre service à leurs amis, son père et sa mère aunaient du calicot dans un faubourg de Moulins.
— La veuve d’un lieutenant-général !
— Lieutenant, oui ; mais général, non.
— Une femme qui a des goûts si modestes !
— Regarde : elle marche sur l’aubusson, s’assied sur le velours, se couche dans la batiste.
— Elle qui ne voulait qu’un pauvre châle de laine !
— Pourvu que cette laine vînt de Cachemire.