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DEUX MOINEAUX SUR MÊME ÉPI

Un jour, un jeune chardonneret, qui était allé rendre visite à une alouette de ses amies, rencontra sur la lisière d’un bois un oiseau dont le plumage lui était entièrement inconnu.

Cet étranger était perché tout en haut d’un arbre, et regardait au loin dans les champs. Mille perles blanches constellaient sa robe brune, et, quand un rayon de soleil glissait sur ses ailes moirées, on voyait luire un éclair chatoyant comme le reflet d’une émeraude. Le chardonneret s’approcha à tire-d’aile du bel oiseau, et, l’ayant salué, lui demanda s’il ne pourrait pas lui être bon à quelque chose.


— Ma foi, vous me tirez d’un grand embarras, répondit l’autre ; tel que vous me voyez, j’arrive d’un pays lointain, et voilà vingt-quatre heures que je n’ai rien mis sous mon bec.


Le chardonneret invita poliment l’oiseau à déjeuner, et tous les deux prirent en l’air le chemin du beau verger.

Le chardonneret était fort curieux d’apprendre le nom et les aventures du voyageur ; mais, en personne discrète, il n’osait le questionner. L’oiseau n’imita pas cette réserve, et, chemin faisant, il ne se lassa pas d’interroger son guide sur les mœurs, les habitudes, le gouvernement de son peuple. Le chardonneret répondait à tout avec discernement et civilité.

Quand on fut arrivé au nid du chardonneret, l’étranger se mit à manger d’un si grand appétit que son hôte fut bientôt à court de provisions. Après avoir dépêché une dernière