Page:Grave - L’Anarchie, son but, ses moyens.djvu/313

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que temps en Espagne, et y avait quelque peu étudié les mœurs.

Elle y avait fait connaissance d’un brave ouvrier, sobre, honnête, laborieux, plein d’amour-propre et de dignité, comme le sont, là-bas, la plupart des travailleurs.

I1 parlait à cette dame de sa famille, de ses nombreux enfants ; comment il les avait élevés, et dirigés dans la vie.

Beppo était apprenti chez un menuisier, Alfonso cordonnier, Carmen apprenait le métier de modiste, Pedro apprenait à être aveugle !

— À être aveugle ! s'écria la dame avec horreur.

— Mais oui ! J’ai donné un beau métier à chacun de mes enfants. Et le père se redressait avec fierté, mais c’est Pedro qui a le meilleur de tous. C’est que, aussi, il me ressemble, et j’ai un faible pour lui.

Et alors il expliquait à la dame scandalisée combien il payait cher pour le traitement du fortuné Pedro dont on affaiblissait la vue par un obscurcissement graduel de ses beaux yeux vifs et hardis. Il ne faudrait guère plus de deux ou trois mois pour qu’il fut tout à fait aveugle.

C’est une si belle carrière que celle d’un mendiant aveugle !

Certes, le père était fier des sacrifices faits pour chacun de ses enfants. Mais c’étaient ceux faits en faveur de Pedro qui l’enorgueillissaient le plus.

Tous les parents, en notre état social, en sont 1à lorsqu’ils se vantent de l’éducation donnée à leurs enfants.

Ils donnent à l’Université des intelligences éveil-