Page:Grave - La Grande Famille.djvu/118

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teilles vides volaient par la portière, visant les gardes-barrières, et, surtout, les gendarmes de planton dans les gares ; les loustics ayant soin d’attendre que le train fût en marche pour lancer leurs projectiles.

Et cette orgie durait pendant les vingt-deux heures, que le train qui avait dû se garer plus d’une fois sur son parcours, mit à franchir la distance de Paris à Brest.

De tout le paysage qui avait défilé devant ses yeux, Caragut ne se rappelait que l’impression que lui avait laissée la vue de Morlaix, quand du viaduc qui la domine d’une si grande hauteur, le train ayant ralenti sa marche, la ville lui était apparue tout à coup comme un assemblage de petites constructions en carton, minuscules, ainsi qu’en découpent les enfants.

Les maisons carrées, blanches, avec leurs toits de tuiles rouges, semblaient si petites, avaient un aspect si propre, si gai, qu’enthousiasmé, Caragut s’était levé pour mieux admirer, mais cela avait filé en un clin d’œil, lui laissant une sensation de fraîcheur et de plaisir.

S’ils n’avaient pas encore endossé l’uniforme, les recrutés commençaient à se ressentir de l’esprit de militarisme. En approchant de Brest, le train ayant pris des voyageurs, les futurs soldats se mi-