Page:Grave - La Grande Famille.djvu/171

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Bracquel se sentant protégé par la sacro-sainte discipline, n’en avait que plus de joie à sentir palpiter, sous sa rude étreinte, ces volontés annihilées par le pouvoir du préjugé. Il jubilait de sentir sourdre ces haines impuissantes à se faire jour, de faire peser son autorité — qu’il croyait être une supériorité — en prolongeant l’angoisse des récalcitrants.

Pourtant, quelles que fussent ses jouissances, l’heure de faire rompre étant sonnée, il dut se résoudre à rendre ses victimes à la liberté, liberté toute relative, puisqu’on allait rentrer « à la boîte », mais du moins on échappait à la torture.

Entre temps Bracquel avait trouvé le moyen de « rallonger la ficelle » à quelques-uns.


Caragut qui avait pris la faction devant la porte du quartier, faisait les cent pas, ayant pour toute distraction de regarder les passants qui sont rares sur cette partie de la route, de voir les soldats rentrant manger leur soupe, lorsque son attention fut attirée, au loin, par les silhouettes de deux troupiers revenant du côté de Brest. Ils se donnaient le bras et paraissaient sérieusement éméchés, car, tout au plus, si la route était assez large pour les zig-zag qu’ils décrivaient en se remorquant l’un