Page:Grave - La Grande Famille.djvu/263

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— Bon ! objecta Mahuret qui, jusque-là, n’avait rien dit, ce que tu nous dis là, ça n’est pas nouveau, je l’ai entendu rabâcher plus de cent fois dans les réunions publiques où j’allais quelquefois à Paris ; mais enfin toutes ces choses que l’on trouve injustes, que l’on ne subit qu’à contre-cœur, contre lesquelles on récrimine tant, comment se fait-il qu’on se les laisse imposer et qu’on s’y plie tout en rechignant ?

— Ça c’est plus compliqué. Il y a d’abord notre éducation, tous les préjugés que l’on nous inculque depuis des siècles. Nous naissons au milieu de choses et d’institutions qui existent et que l’on nous apprend à respecter ; on s’y développe, on y grandit, en entendant tous les jours vanter cet état de choses comme immuable ; on nous apprend que les maux dont nous nous plaignons sont dus à l’imperfection humaine, et que nous devons les subir en échange des avantages que nous procure l’organisation sociale ; on nous assure que si nous touchions trop brusquement à cette dernière, il en découlerait des maux encore pires que ceux que nous voulons empêcher ; que notre existence et notre bien-être sont attachés à la conservation de ce qui est.

Si toutes les institutions que vous trouvez si mauvaises, nous dit-on, venaient à disparaître,