Page:Grave - La Grande Famille.djvu/345

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Hagards, effarés, les hommes de la chambrée avaient assisté à ce spectacle sans penser à s’interposer ; ils étaient stupéfaits. Chapron avait pris la porte, on l’entendait hurlant dans la cour : « à la garde ! »

Caragut porta vivement la main à la poche de sa veste pendue au mur, en tira une cartouche qu’il avait escamotée à un tir précédent, la glissa rapidement dans le canon de son fusil, et, assurant la crosse à terre pendant qu’il appuyait le menton sur l’extrémité du canon, il pressa de son orteil sur la détente et tomba mort, la mâchoire fracassée.

— Nom de Dieu ! s’écria Mahuret qui, voyant Caragut sortir la cartouche de sa poche, avait deviné sa résolution, et avait sauté à bas de son lit, dans l’intention de l’arrêter, mais était arrivé trop tard.

— Il l’avait toujours dit, pensa-t-il, que s’il se voyait en situation de passer devant le conseil de guerre, il préférerait se tuer. Il a voulu, tout au moins, faire payer le sacrifice de sa vie à ceux qui sont responsables de sa mort.

Et, s’étant penché sur le corps de Caragut, après avoir constaté qu’il était bien mort :

— Pauvre diable ! il vaut peut-être mieux que je n’aie pu l’empêcher de se tuer, il a eu raison !… ce n’est pas gai, Biribi… Puis, ayant jeté un regard sur Balan qui ne bougeait plus et sur Brac-