Page:Grave - La Grande Famille.djvu/72

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quelques instants, la colonne entière hurlait :

C’est le sire de Fisch ton Kan,
Qui s’en va-t-en guerre, Etc.

Les officiers ne firent pas d’observation, mais à voir leur figure se pincer on comprit que la satire politique n’était pas, par eux, aussi bien cotée que la pornographie.

Rousset, lui, ne dit rien non plus, mais, sous prétexte qu’on allait gravir une légère montée, il donna l’ordre aux clairons d’emboucher leurs instruments et de sonner le pas de charge.

Il y a la goutte à boire, là-haut !
Il y a la goutte à boire ! Etc.

Et la colonne dut aller au pas de charge, sans s’arrêter ni souffler.

Et comme à chaque reprise, Rousset faisait accélérer la cadence, la colonne ne marchait plus, elle semblait voler dans l’espace, le pied posait à peine à terre ; les hommes, la gorge sèche, la poitrine oppressée, la respiration haletante, franchissaient les kilomètres, entraînés par l’obsession du refrain !

Il y a de la goutte à boire, là-haut ! Etc.

Cela dura une bonne demi-heure sans s’arrêter ni souffler.