Page:Grave - La Grande Famille.djvu/74

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Les malins les interpellaient par quelque grossièreté, y joignant le geste parfois.

C’était tout juste si on ne les arrêtait pas pour se les passer de main en main. À voir ces jeunes gens aux yeux allumés, on aurait dit une bande de sauvages. Tous ces mâles en rut, ne se tenant qu’à un cheveu de fourrager les jupes qui passaient à leur portée, donnaient une idée de ce dont peuvent être capables des armées lâchées en pays envahi…

Les officiers rigolaient, et sauf le souci de compromettre leur dignité, ils auraient embrassé les paysannes qui passaient nu-jambes, leurs sabots à la main.

Seuls, les vieux officiers ronchonnaient entre leurs dents, non pas de la conduite de leurs hommes, mais de la fatigue et de la longueur de la marche dont ils ne pouvaient encore prévoir le terme.

Avec son idée de rompre les recrues à la fatigue, le commandant Rousset ne ménageait personne : officiers et soldats pivotaient les uns comme les autres. Payant de sa personne, il fallait que tous ceux qui étaient sous ses ordres en fissent autant.

Et comme le bataillon comptait quelques vieux capitaines qui n’attendaient plus que leur retraite et auraient bien désiré finir en paix le restant de leur service, ils étaient furieux contre Rousset.