Page:Grave - La Grande Famille.djvu/76

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laissa accoler, en chansons, toutes celles que l’on voulut, les passages les plus raides passèrent sans qu’il sourcillât, il ne trouvait plus que c’étaient des gravelures.

Pourtant, à la fin, les chants perdirent de leur intensité, l’entrain baissait encore une fois.

Quelques enragés continuaient pourtant de brailler pour prouver qu’ils ne sentaient pas la fatigue ; d’autres essayaient de leur donner la réplique, mais la fatigue reprenait le dessus et les refrains ne se répétaient que mollement.

Cette marche forcée, le piétinement dans la boue des chemins de traverse, avaient brisé les recrues.

Les traînards commençaient à s’égrener sur la route. La voiture du cantinier était chargée de sacs et de fusils.

Les hommes voyaient fuir derrière eux les bornes kilométriques, sans se rendre compte de la distance, n’ayant aucune notion de la topographie. La route s’allongeait au loin, devant eux, déserte, interminable et ils se demandaient s’ils en avaient encore pour longtemps à être trimbalés de la sorte.

— Merde ! fit Mahuret, on ne va donc pas s’arrêter ? Voilà deux heures, au moins, que nous marchons depuis la grand’halte, je commence à en avoir assez. Gelés ce matin par le vent et la