Page:Grave - La Grande Famille.djvu/80

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— le lieutenant était en convalescence et le sous-lieutenant parti pour la Cochinchine. — Un moment après s’être remis en route, les hommes de la 28e virent passer, au grand galop, une espèce de patache faisant le service entre un village voisin et Brest : leur gros capitaine, avec deux autres officiers, y était béatement installé.

Le soleil, à présent, haut à l’horizon, versait des torrents de lumière et de chaleur. À droite, à gauche, s’étendaient de maigres champs de sarrazin, tous clos de cette inévitable muraille de terre battue surmontée d’un clayonnage de branches coupées ou de semis de chênes rachitiques et d’ajoncs marins, aux fleurs jaunes, au feuillage hérissé de piquants qui servent, dans le Léonais, de bornes à la propriété individuelle, défenses que se plaisent à élever les paysans et qui doivent leur manger, en clôture, une bonne partie de terrain qu’il serait plus profitable d’ensemencer, sans préjudice de l’air et du soleil qu’elles interceptent.

La route s’étendait droite, longue, unie, ne présentant aucun point de repère qui pût faire pressentir la proximité de la caserne.

Un silence farouche pesait sur la colonne. Pour le rompre, le commandant ordonna aux clairons de sonner le pas accéléré. Il fallut reformer les rangs, porter l’arme à l’épaule.