Page:Grave - La Société future.djvu/282

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faut tenir compte, sans que nous ayons besoin d’insister davantage ici. Et pour envisager les relations dans la société future, il faudrait tenir compte des transformations opérées, et ne pas continuer à se placer toujours au point de vue de la société actuelle.

Aujourd’hui le travail est considéré comme déshonorant. Le but à acquérir, montré aux efforts de l’individu, est d’arriver à une situation lui permettant de vivre sans rien faire — de productif, tout au moins. — Le travailleur est courbé, lui, sous un travail éreintant, des douze, treize et quatorze heures de suite, le plus souvent dans les conditions les plus malsaines, sur un travail répugnant, et cela pour obtenir un salaire dérisoire qui lui permet à peine de ne pas crever de faim[1]. Rien de plus logique à ce que les individus soient dégoûtés de travailler. Nous ne sommes, nous, étonnés que d’une chose : c’est que, devant l’oisiveté et le luxe des riches, les individus ne soient pas encore plus dégoûtés d’user leurs forces dans un travail sans issue, et n’aient pas plus souvent retourné la nappe.


Mais, lorsque, comme nous l’avons vu, on aura, dans la société future, rendu au travail productif cette foule de salariés qui, aujourd’hui, peinent à faire fonctionner l’organisation gouvernementale et capitaliste qui nous écrase dans ses multiples engrenages, ceux qui ne travaillent qu’à épargner un effort mus-

  1. Trait caractéristique du travail dans la société actuelle : plus le travail est rude et répugnant, moins il est payé. Les hauts salaires sont réservés aux travaux de luxe, à ceux qui ont pour motif le service personnel de la bourgeoisie.