Page:Grave - La Société future.djvu/341

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pratiquaient l’amour librement n’eurent qu’un effet, rendre les individus fourbes, menteurs et hypocrites, sans les rendre plus chastes ni plus continents. On dévie la nature quand on la contrarie, mais on ne la dompte pas. Ce qui se passe dans notre société soi-disant civilisée est là pour le prouver. On y a poussé la pruderie à l’extrême, l’adultère, la prostitution, la corruption, la transformation du mariage légal en véritable maquerellage, sont les conséquences de cette intelligente organisation et législation. Les infanticides nous prouvent que la honte jetée sur la fille qui se livre à l’amour n’empêche personne d’y goûter à l’occasion, mais que les conséquences qui en découlent peuvent entraîner au crime pour cacher une soi-disant faute.

Aujourd’hui, pourtant, la société perd de son rigorisme, la religion, on n’en parle même plus. Sauf quelque grue qui veut étaler sa toilette blanche ou l’héritier qui veut se concilier les bonnes grâces de parents à héritage, un peu retardataires, peu de personnes éprouvent le besoin d’aller s’agenouiller devant un monsieur qui se déguise en dehors des jours de carnaval. Quant à la sanction légale, si on voulait faire le recensement parmi la population de nos grandes villes, on trouverait bien que tous les ménages ont passé par la mairie, mais en examinant d’un peu près, on pourrait s’apercevoir que les trois quarts ont rompu, sans tambour ni trompette, les nœuds légaux pour en former d’autres sans aucune consécration officielle ce coup-ci, et que les ménages ne sont plus formés comme ils ont été inscrits à la mairie : Il y a bien toujours un monsieur et une madame A., un monsieur et une madame B., mais la madame A. connue des voisins, se