Page:Grave - La Société future.djvu/400

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En effet, qui peut prévoir le degré de développement où nous serions arrivés si l’humanité avait pu évoluer librement ; qui ne sait, aujourd’hui, que beaucoup de découvertes dont s’enorgueillit le XIXe siècle, avaient été faites ou pressenties jadis, mais que les savants avaient dû tenir secrètes, ou en abandonner la recherche afin de ne pas être brûlés comme sorciers.

Si le cerveau humain n’a pas été broyé dans ce double étau : l’autorité temporelle et l’autorité spirituelle ; si le progrès a pu se faire malgré cette compression, sous laquelle l’humanité gémit depuis que l’homme est un être pensant, c’est que l’esprit d’insubordination était plus fort que la compression.

Les autoritaires disent qu’ils ne veulent un pouvoir que pour guider cette évolution des idées et des hommes. Mais ne voient-ils donc pas que vouloir contraindre tous les hommes à subir le même mode d’évolution — ce qui arriverait inévitablement si une autorité quelconque se chargeait de la guider, — ce serait cristalliser la civilisation dans l’état où elle est aujourd’hui. Où en serions-nous actuellement si, parmi les êtres inconscients des premiers âges de la vie, il s’était trouvé des esprits « scientifiques » assez puissants pour diriger l’évolution des êtres dans le sens des connaissances qu’ils possédaient à cette époque ?


Nous avons vu qu’il ne fallait pas en conclure que notre idéal, à nous, soit ce que les partisans de Darwin en sociologie, ont appelé la « lutte pour l’existence. » La destruction des espèces plus faibles par les espèces plus fortes a pu être une des formes de l’évolution dans le passé, mais aujourd’hui que l’homme est un