Page:Grave - Le Mouvement libertaire sous la IIIe République.djvu/65

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sont bourrés d’articles où je répondais à ceux qui ne concevaient la propagande révolutionnaire que sous la forme d’articles au vitriol.

Il faut dire que la période fut agitée. Lorsqu’on relit les journaux révolutionnaires de la période de 1882 à 1886 surtout, on a l’impression d’être à la veille d’une révolution. C’est par centaines que l’on peut compter les condamnations — et quelques-unes très sévères — pour délits d’opinion. Les actes individuels et collectifs de révolte éclataient un peu partout.

Montceau, Decazeville, en France. Mais aussi en Espagne, en Italie, en Belgique, en Irlande, en Hollande, en Amérique. Nombre de nos camarades, du reste, croyaient la révolution proche. Et, parmi eux, beaucoup, malheureusement, au lieu de chercher ce qui devrait être fait dans cette révolution qu’ils voyaient imminente, se laissaient aller, dans leur impatience, à faire chorus avec les braillards.

On nous acceptait comme nous étions, mais cela n’allait pas sans discussions. Le sentiment de notre insuffisance révolutionnaire persista chez beaucoup. Aussi, lorsque Hervé se présenta avec sa Guerre Sociale et sa Mam’zelle Cisaille, son citoyen Browning, sa surenchère et toute sa comédie sur-révolutionnaire, il eut tout de suite un succès que nous n’avions pas connu pour notre compte. Mais c’est une histoire qui viendra à sa place.

Les anarchistes avaient établi une permanence à la salle Horel, rue Aumaire. Là, le mouchard Martinet sut y prendre la prépondérance. On en arriva à discuter « s’il était anarchiste d’estamper un camarade » ! Et, comme de juste, on conclut par l’affirmative, personne n’ayant le droit d’avoir deux chemises ou deux paires de souliers, alors que d’autres n’en possédaient pas.

Les anarchistes sérieux, au lieu de rejeter ce joli