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LE CIMETIÈRE


DE CAMPAGNE.




Le jour fuit ; de l’airain les lugubres accents
Rappellent au bercail les troupeaux mugissants ;
Le laboureur lassé regagne sa chaumière ;
Du soleil expirant la tremblante lumière
Délaisse par degrés les monts silencieux ;
Un calme solennel enveloppe les cieux ;
Et sur un vieux donjon que le lierre environne,
Les sinistres oiseaux, par un cri monotone,
Grondent le voyageur dans sa route égaré,
Qui vient troubler l’empire à la nuit consacré.
Près de ces ifs noueux dont la verdure sombre
Sur les champs attristés répand le deuil et l’ombre,
Sous ces frêles gazons, parure du tombeau,
Dorment les villageois, ancêtres du hameau.
Rien ne peut les troubler dans leur couche dernière,
Ni le clairon du coq annonçant la lumière,
Ni du cor matinal l’appel accoutumé,
Ni la voix du printemps au souffle parfumée.
Des enfants, réunis dans les bras de leur mère,
Ne partageront plus, sur les genoux d’un père,