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EN RACONTANT

à petites journées, afin de découvrir les traces des gens du canot. À quelques lieues de l’endroit où s’élève aujourd’hui le phare gardé par M. Pope, les gens de M. Volant découvrirent les corps de deux hommes qui gisaient sur la grève, à quelques pas des fragments d’une petite embarcation. C’était là ce qui restait pour indiquer le sort des treize hommes qui avaient vogué de conserve avec la chaloupe de M. de Freneuse, jusqu’au moment où ce dernier les avait perdu de vue, en doublant par une grosse mer la pointe sud-ouest, le soir du deux décembre 1736. »

Quarante-six ans auparavant, en 1690, un des vaisseaux de la flotte de l’amiral Phipps, commandé par le capitaine Rainsford, vint s’abattre sur les brisants de l’île, où il débarqua avec quelques-uns de ses compagnons. Plusieurs furent noyés en essayant de prendre terre, et les autres, s’installèrent le mieux qu’ils purent sur la côte où de terribles épreuves les attendaient. Chaque homme dût se contenter d’une ration de deux biscuits, une demi-livre de lard, une demi-livre de farine, une pinte et quart de pois et deux petits poissons.

On se trouvait au commencement de l’hiver. La maladie acheva de décimer ces malheureux. Quarante hommes moururent du scorbut en quelques semaines. La faim qui les torturait était telle, que