Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/143

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On comprend, après cola, que d' Aurevilly ail donné pour Ihéatre à son Prêtre Marie, — <\\\\ parut en celto même année lSi)4, — celte région du Gotentin si féconde en injpressions et en souvenirs; on comprend mieux encore qu'il ait illustré son roman du double caractère, aristocratique et mystique, qui lui assigne un rang à part dans la haute littérature catholique la plus ortho- doxe. Ici, la Normandie ne semble évoquée que pour rendre plus éclatant et marquer en traits plus précis l'hommage au passé. C'est l'àme « traditionnelle » et séculaire des aïeux, survivant jusque dans Tàme déchue de Tex-abbé Sombreval, qui apparaît en pleine lumière, à la place d'honneur qui lui est due. Mais elle vivifie d'un souffle plus puissant encore et très pur l'angélique Calixte et le touchant Néel de Néhou. Dans le Prêtre Marié, c'est la Normandie catholique qui est au premier plan, de même que, dans \ Ensorcelée et le Chevalier Des Touches, on apercevait surtout la Normandie militaire et fièrement « individualiste».

Plus tard, en compagnie des Diaboliques, nous pénétrons dans une Normandie qui a le culte de l'aristocratie la plus jalouse et la plus obstinée. Le vicomte de Brassard, de haute noblesse normande, raconte ses bonnes fortunes de garnison avec une désinvolture de grand seigneur. Le comte Jules-Amédée-Hector de Ravila de Ravilès narre avec un sans-gêne de hobereau son «plus bel amour de Don Juan ». Le comte de Savigny, avec une impudence de noble «Valognais», trouve « le bonheur dans le crime ». Le chevalier de Mesnilgrand, en aristocrate qui se croit tout permis, détaille dans son hôtel de Valognes ses prouesses d'antan, « à un dîner d'athées ». Mais nulle part le caractère finement aristocratique de ce coin de Normandie et de ces personnages normands ne se fait