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tone » : il « décentralise » quand même et toujours, pour son propre compte, sinon pour autrui, afin d'assurer à jamais sur des bases inébranlables sa pleine autonomie, farouche et intangible.

Bref, le critique des Prophètes du Passé et le roman- cier à' Une Vieille Maîtresse s'est fait gloire, en un temps de rivalités tumultueuses et de turbulentes coteries, de demeurer solitaire, pur de toute compromission avec les idées du jour et inaccessible à la foule : il s'est montré « individualiste » sans faiblesse. A une époque de démo- cratie, il s'est affiché aristocrate hautain et indomptable, dédaigneux des innovations révolutionnaires, épris des principes d'autorité et par-dessus tout confiant dans la « force » monarchique. Il fut, en un siècle d'incrédulité scientifique, un catholique d'instinct et de raison, un « affamé de foi », un crédule, si l'on veut, — en tout cas, un croyant inflexible, ennemi déclaré de toute atteinte aux dogmes immuables de sa religion et au culte sécu- laire de son Dieu. Et tous ces liens qui le retenaient au passé, il les aff'ermit encore, dans un âge d'émiettement social et de nivellement centralisateur, par un attache- ment systématique au foyer ancestral : il fut un vrai Normand, pieusement fidèle à sa province et l'aimant comme une seconde mère. Il ne ressemble donc en rien à la plupart des écrivains du XIX^ siècle, « déracinés » de leur sol natal, des traditions de l'ancienne France et de la religion de leur famille. Lui, il plonge ses racines au plus profond de la « féodalité » catholique et terrienne.

Son programme est tout Topposé des programmes contemporains.* Quand ils disent de partout,— s'écrie-t-il fièrement,— que les nationalités décampent, plantons-nous hardiment, comme des Termes, sur la porte du pays d'où nous sommes, et n'en bougeons pas ! » Et il lève