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Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/187

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il ne les secoue pas, il n'a pas Tinlérêt haletant et pathétique, mais il attendrit dans ses bons moments. Il ne coûte qu'une larme, et, pour le gros des yeux, c'est assez. Tel est M. Sandeau l'académicien, — qui l'était de ton, d'honnêteté, de modération, avant d'être de l'Aca- démie. On l'a loué, et Je le loue aussi, d'avoir passé sa vie dans la noble préoccupation du travail, dans le chaste recueillement de l'étude... Eh! que lui fallait-il davan- tage?... Eh bien! c'est cette délicatesse, qu'il a eue autrefois et que nous nous attendions àtoujours retrouver chez M. Sandeau, que nous avons vainement cherchée dans le nouveau roman qu'il publie » (1). Il n'est pas une ligne de cette page, qui soit vraiment de la critique ; c'est de la causerie fine et légère, piquante et superficielle. Les phrases courtes, les incorrections mêmes qui trahis- sent le laisser-aller du grand seigneur, les exclamations qui marquent un repos au moment où l'orateur a besoin de reprendre haleine, les «eh! »,les « eh bien!» qu'affec- tionne tant d'Aurevilly et que l'on rencontre à chaque feuillet de ses livres, — tout dénote et révèle le mondain qui cause dans un salon pour le divertissement de l'audi- toire.

Voici maintenant le critique. « Ce qui restera de M. Sue, c'est le mal qu'il a fait, sans que la conviction l'excuse. Les doctrines de ses livres, il n'y croyait pas ! L'auteur du Juif Et-rant n'aura pas même cette justifi- cation dernière de la duperie de son esprit, car il ne fut pas dupe. Le breuvage qu'il a versé aux autres, il ne s'en est jamais enivré. La question, pour ce Laurent le Magnifique de la littérature socialiste qui donnait à boire et à manger aux imaginations phalanstériennes, c'était

(1) Les Romar}ciers, p. 80 et 81 (.\myot, éditeur, 1865).