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sa table d'anatomie, le coupe en quatre, explique les secrets ou de sa mort ou de sa vie » (1). Mais combien de fois ne s'est-il pas soustrait aux dures exigences de cette impartialité absolue ? Combien de fois n'a-t-il pas opposé aux idées d'autrui, pour les écarter sans rémission, ses propres croyances et ses sensations personnelles? Déjà il restreint à sa guise la définition de la, critique, lorsqu'il dit que « pour mériter ce nom (elle) doit être tout à la fois esthétique et morale, parce que toute œuvre de litté- rature ou d'art s'adresse nécessairement, et du même coup, à l'intelligence et au cœur ». Mais il ne s'en tient pas là: il va plus loin dans les étroits sentiers de l'arbi- traire et prétend ériger la critique en un tribunal infaillible, en une sorte de magistrature d'Inquisition ou de cour martiale. C'est vouloir mettre au ban de la société des Lettres, —et mieux, de la Société, tout court, — les libres esprits qui n'ont fait vœu de soumission à aucune doctrine. Les théories aristocratiques de Barbey d'Aurevilly se trouvent être, ainsi, caduques et sans portée.

Il les aggrave encore, si c'est possible, — comme s'il craignait qu'elle ne fussent trop modernes, — par son cathohcisme intransigeant. \] Ensorcelée, le Chevalier Des Touches, le Prêtre Marié, s'affichent romans catholiques; et d'Aurevilly a même l'ambition de faire passer pour tels des œuvres comme les Diaboliques, Une Histoire sa?is nom. Ce qui ne meurt jms. N'écrit-il point au sujet de ce dernier roman: « Ce livre religieux à force de tristesse. Le néant des passions humaines prouve la nécessité de Dieu ». On peut croire que c'est à cette partie de son esthétique qu'il tient le plus ; en tout

(1) Les Ridicides du temps, p. 13 ,ed. Rouveyre, 1883).