Page:Grelé - Jules Barbey d’Aurevilly, L’œuvre, 1904.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

- 51 —

rauli'o coté, la mystique Calixto, vivaiit d'une vie sur- naturelle, « extasiée » sous le regard du Christ et « abîmée » toute eu Dieu. Et l'histoire si touchante d'amour profane, qui apporte un joli reflet de tendre poésie au drame de ces existences vouées au malheur ne semble destinée qu'à mettre plus en relief la fantas- tique opposition des caractères et l'idéale grandeur des situations.

Mais voici venir les Diaboliques et, avec elles, nous entrons en plein romantisme passionnel et ardent. Qu'on ne s'y trompe pas : ce n'est pas l'œuvre d'un jeune homme, qui se croit tout permis et que brûle le feu de la virilité commençante. Non! c'est l'œuvre d'un homme mùr, presque d'un vieillard, qui a semé bien des illusions sur le chemin de la vie, qui n'a plus les démangeaisons sensuelles de la vingtième année et que les atteintes de l'âge, outre le respect qu'il se doit à lui-même, ont passablement refroidi. A 66 ans, on ne publie pas les Diaholiques pour y chercher le grossier succès d'un scandale de mauvais aloi. Un « vieux marcheur » jouirait en silence, dans ses instincts dépravés, du piment des situations risquées et des allures polissonnes ; mais il ne s'en vanterait pas et n'oserait attirer l'atten- tion sur ses débauches par une publicité maladroite. A plus forte raison, s'il s'agit d'un vieillard ayant souci de sa dignité et conscience de ses devoirs, doit-on résolu- ment écarter toute arrière-pensée et toute accusation d'immoralité sénile. Chez d'Aurevilly, la passion est de stricte et pure essence romantique. 11 donne libre cours, non pas à ses instincts d'homme, mais à ses besoins d'écrivain. Il est emporté par nature intellectuelle et non par sensualité. 11 a des passions qui hantent son cerveau bien plus que son cœur. Il laisse vagabonder son imagi-