Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/119

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Cel jugleor là où ils veunt
Tuit leur vièles traites uns
Laiz sonnez veunt viellant.

(Guillaume de Saint-Clair.)

Les auteurs des deux citations précédentes ont certainement voulu designer plusieurs instruments par le mot vièles, dont ils se sont servi d’une façon générique ; et on peut supposer que la vielle à roue devait en faire partie, car à cette époque tout ménestrel digne de ce nom était tenu de la connaître.

Guillaume de Machault la cite honorablement parmi les instruments qui prenaient part au concert de Prague ; il ajoute qu’aux xiie et xiiie siècles elle passait pour un instrument très doux et très harmonieux[1]. Elle portait alors le nom de symphonie, ou chiffonie, mais les vieux poètes l’ont aussi appelée vièle et viole.

L’une des plus agréables productions du xiiie siècle, le Roman de Gérard de Nevers ou de la Violette, contient le passage suivant :

Après le souper se couchièrent
Dusqu’al demain h’il ajourna,
Gérars mie ne séjourna,
Ains se leva isnièlement
Et vesti j vies garnement.
Et pent à son col la vièle
Que Gérars bien et bel vièle[2].

Sur la miniature placée en tête du chapitre[3] contenant ces vers, Gérard est représente déguisé en ménestrel et ayant une vielle à roue ou chiffonie pendue à son côté gauche, qu’il porte comme une rapière. Au-dessous de

  1. Émile Travers. Les instruments de musique au xive siècle, d’après Guillaume de Machault.
  2. Le Roman de la Violette, ou de Gérard de Nevers, du xiiie siècle, par Gilbert de Montreuil, publié par Francisque Michel, Paris, 1834, d’après le manuscrit de la Bibl. nat., fonds la Vallière. no 92.
  3. P. 69.