Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/50

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sement des cordes. C’est le principe de l’âme des instruments à archet, et c’en est probablement la première application.

Edward Jones décrit ainsi le chevalet du crouth :

« Le chevalet n’est pas placé à angles droits avec les côtés du crouth, mais dans une direction oblique ; et, ce qui est à remarquer en outre, un des pieds du chevalet sert aussi d’âme. Il passe par une des ouïes, lesquelles sont circulaires et s’appuie sur la table inférieure ; l’autre pied, plus court, est posé sur la table près de l’autre ouïe[1]. »

L’âme des instruments à archet, n’est autre que la petite tige de bois arrondie, qui est placée à l’intérieur de la caisse, perpendiculairement, entre les deux tables, à droite, un peu en arrière du chevalet. Cette pièce, qui a une si grande influence sur la qualité du son, d’après ses proportions, la place qu’elle occupe, et son plus ou moins d’adhérence aux tables, leur est indispensable ; sans elle, la table supérieure céderait à la tension des cordes ; car celles-ci, passant sur un chevalet assez élevé, exercent une pression d’autant plus forte, que le tirage ne se fait pas horizontalement. Elle sert encore à transmettre les vibrations de la table supérieure à la table inférieure, et remplit, de ce fait, un rôle acoustique de la plus haute importance. Avec sa construction toute spéciale, le chevalet du crouth accomplissait donc à la fois les fonctions d’un chevalet ordinaire et celles de l’âme. Ce système devait offrir bien des inconvénients, dont le

  1. The bridge is not placed al right angles with the sides of the crwth, but in an oblique direction ; and, which is farther to be remarked, one of the feet of the bridge serves also for a sound post ; it goes through one of the sound-holes, wich are circular, and rests on the inside of the back, the other foot, which is proportionably shorter, rest on the belly before the other sound hole. (A Dissertation, p. 115.)

    À l’Exposition universelle de 1880, à Paris, nous nous souvenons d’avoir vu un violon ayant un chevalet-âme, imité du chevalet du crouth, qui figurait dans la section des États-Unis d’Amérique, et que M. Dion, son auteur, présentait comme une invention nouvelle. Il est vrai qu’ici, c’était le pied droit du chevalet-âme qui passait par un trou pratiqué dans la table, pour aller s’appuyer sur le fond ; tandis que dans le crouth, c’est le pied gauche du chevalet qui joue le même rôle en passant par l’ouïe gauche. Mais il n’y avait pas d’autre différence entre le chevalet du crouth et celui de M. Dion.